Les affrontements de vendredi, à Bujumbura, ont fait 87 morts, dont quatre soldats et quatre policiers, a déclaré, ce samedi après-midi, le porte-parole de l'armée. Selon Gaspard Baratuza, 79 assaillants ont été tués et 45 autres capturés, vendredi, lors de l'attaque.
« Les opérations de nettoyage ont pris fin à l'heure qu'il est », a précisé le porte-parole de l'armée burundaise avant d'ajouter qu'une centaine d'armes avaient été saisies.
Entretemps, ce samedi matin, des habitants horrifiés découvraient des dizaines de cadavres dans les rues.
Ce sont des crimes d’une véritable scène d’horreur qui ont ainsi été perpétrés dans le quartier de Nakabiga, dans le centre de Bujumbura. Des habitants terrorisés après une journée et demie d’enfer ont découvert dans les rues, dans les caniveaux, de jeunes gens tués par balle, dont certains à bout portant. Ils décrivent des têtes explosées. Pour d’autres, on voit bien que la balle est entrée par le haut du crâne.
Dans le quartier de Musaga, dans le sud de Bujumbura, qui est plus difficilement accessible, car il était toujours en partie bouclé ce samedi, les habitants avaient déjà découvert quatorze corps vers 10 heures. Ils accusent les forces de l’ordre de les avoir empêchés d’accéder à des secteurs où il y aurait encore plus de morts, dans le but de faire disparaître ces corps.
Vendredi, vers 13 heures, ce même porte-parole, le colonel Gaspard Bratuza, avait donné un bilan de l’attaque des trois camps de l’armée, la plus violente depuis la tentative de coup d’Etat armé, faisant douze tués parmi les assaillants. Alors comment tous ces jeunes gens sont-ils morts, des heures bien après cette attaque ? C’est la question qui se pose ici.
Les deux visages du Burundi
Pendant ce temps, dans le camp du pouvoir, les partisans du président Pierre Nkurunziza célèbrent la victoire de l’armée. Des milliers de partisans du pouvoir ont manifesté dans le centre-ville de Bujumbura ainsi que dans les chefs lieu de toutes les provinces du pays, à l’appel du ministère de l’Intérieur.
Officiellement, il s’agit d’une marche pour la paix, mais c’est aussi une manifestation de soutien aux soldats et policiers burundais qui ont défait l’ennemi, vendredi. Ils ont marché et manifesté, sur des rythmes de musique en chantant et en dansant. Véritablement aujourd’hui, le Burundi a deux visages.
Aujourd'hui, le Comité international de la Croix-Rouge demande, sur RFI, un accès immédiat aux zones de combats. Les services d'urgence de la Croix-Rouge n'ont pas encore pu avoir accès aux dépouilles. Joint par RFI, Shahïn Ammane, représentant de l'organisation dans la capitale burundaise, estime qu’il est urgent que ces corps soient identifiés et restitués aux familles.
« Ces corps-là doivent être traités de manière tout à fait digne. L’identification doit être faite et les dépouilles mortelles doivent être remises à leurs familles pour qu’un deuil puisse être fait. Pour nous, c’est vraiment une question de droit, de savoir que les dépouilles mortelles doivent être traitées en règle avec les contions internationales et qu’elles puissent justement être restituées à leurs familles, le cas échéant », a déclaré à RFI, Shahïn Ammane.
« Nous sommes en négociation, bien sûr, avec les autorités burundaises. Nous faisons de notre mieux pour leur rappeler, justement, leur devoir vis-à-vis de leurs citoyens. Nous savons que des levées de corps ont déjà été entreprises et il est vrai que beaucoup de familles s’inquiètent et se demandent ce que sont devenus leurs proches qui sont décédés », a précisé le représentant de la Croix-Rouge à Bujumbura.