Tunisie: après l'attentat, Sousse en deuil et en colère

A Sousse, les habitants sont marqués par l'attentat qui a ciblé un hôtel de cette station balnéaire vendredi 26 juin. Un attentat revendiqué par le groupe Etat islamique et qui a fait au moins 38 morts. Les habitants ont organisé des manifestations spontanées pour exprimer leur colère face à cette attaque. A l'issue d'une marche, ils ont déposé plusieurs bougies devant l'hôtel où s'est produit l'attentat.

« Sousse libre », « le terrorisme dehors ». Ce sont les slogans des quelques centaines de pères et mères de famille qui ont marché spontanément dans les rues de la ville samedi soir, en hommage aux victimes de l'attentat.

Cette manifestation est dédiée à la lutte contre le terrorisme, mais c'est aussi, pour des citoyens lambda, l'occasion de pointer du doigt, des maux très profonds. « Il faut prendre en charge les questions éducatives et sociales, afin d'éviter aux jeunes de dériver dans des mouvements extrémistes », indique Jaled Ahmed, un habitant de Sousse.

Pour cette région touristique, tout l'enjeu, c'est de pouvoir continuer à attirer des clients. De l'hôtellerie, en passant par l'artisanat, ce secteur fait vivre près de 400 000 personnes dans tout le pays. Cela représente près de 25 % du PIB. Alors, les acteurs locaux sont bien soucieux des solutions apportées pour restaurer la confiance des touristes, notamment le renforcement du dispositif sécuritaire.

La crainte des commerçants

Plus tôt dans la journée, le quartier touristique de la médina de Sousse, protégé par ses remparts historiques, était presque désert faute de clients. Plusieurs céramiques multicolores étalées devant lui, Majid n'espère plus vendre ses poteries. « En principe, on doit travailler quatre mois au moins en saison. Maintenant, c’est fini. Puisqu'il y a eu l’attentat, beaucoup de touristes sont repartis », regrette le vieux vendeur.

Dans les allées étroites de ce marché, on trouve pourtant de tout : des djellabas, des sucreries locales et des bijoux. Mais à travers ce nouvel attentat, les commerçants craignent que leurs revenus soient directement touchés. A l'image de Mohammed, qui vend des sacs en cuir. « Après ce qu'il s’est passé à Sousse, jusqu’à maintenant, je n’ai rien vendu. »

Mesures sécuritaires insuffisantes

Il y a trois mois, le gouvernement avait promis une série de mesures sécuritaires pour éviter une régression du secteur touristique. Mais les contrôles tant promis n'ont visiblement pas suffi. Le commerçant Najib regrette le retard pris dans la surveillance des sites balnéaires. « On en parle toujours. A Sidi Bouzid, dans la médina, dans les hôtels, on attend toujours parce qu’il n’y a pas de discipline de l’Etat contre les extrémistes. »

A la médina, on espère que des mesures concrètes seront prises à l'issue du conseil national sur la sécurité qui se tient ce dimanche à Tunis.

Le tourisme en danger

Des milliers de touristes étrangers s'empressent de quitter la Tunisie, deux jours après le carnage perpétré dans l'hôtel près de Sousse. A l'aéroport parisien d'Orly, d'où partent d'habitude des vols affrétés par des tour-opérateurs travaillant avec la Tunisie, les touristes français en partance pour ce pays sont de moins en moins nombreux.

Une certaine nervosité est palpable aux guichets d'enregistrement de vols à destination de Monastir, une ville côtière située à une vingtaine de kilomètres de la station balnéaire de Sousse. Il y a des familles avec des enfants, mais très peu de touristes. Nala part en vacances, mais le coeur n'y est pas. « On a une maison, moi je suis originaire de là-bas. Il n'y a pas de tourisme mais on part avec une peur dans le ventre. »

Rapatriements

Du côté des arrivées, Jacqueline revient tout juste de Djerba. Elle passe la moitié de l'année sur cette île très touristique située au sud-est de la Tunisie. Elle s'inquiète pour le secteur du tourisme, vital pour l'économie du pays.

« Le peuple est triste et les gens sont d'autant plus tristes qu'ils vivent de l'économie du tourisme. Ça avait l'air de reprendre un tout petit peu mais là ça fait un frein. Il y a des gens qui sont arrivés hier [vendredi ndlr] et qui repartent aujourd'hui ! »

Les tour-opérateurs annulent massivement leurs vols vers la Tunisie. Les syndicats tunisiens des professionnels du voyage recommandent aux voyagistes d'accepter les reports sans frais des départs vers la Tunisie, et ce pour les 12 prochains mois.

Mais d'autres ont décidé de rester. Ecoutez notre reportage à Sousse, auprès des touristes qui continuent leur vacances malgré l'attentat.

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