Le 16 janvier 2001, vers 13h30, Laurent-Désiré Kabila est abattu dans son bureau de trois balles par l’un de ses gardes du corps, Rachidi Kasereka. Il sera lui-même tué quelques minutes plus tard par l’aide de camp du président, un certain Eddy Kapend. Le principal complice, qui attendait le meurtrier dans une voiture à l’extérieur du palais présidentiel, réussit à prendre la fuite. S’ensuit alors une gigantesque rafle dans l’entourage du président défunt.
En 2002, 120 prévenus sont jugés en neuf mois dans un procès express devant une cour militaire. Certains ont subi de la torture. Trente personnes sont finalement condamnées à mort. Parmi elles, le fameux Eddy Kapend, qui a pourtant neutralisé l’assassin de Kabila père. Vingt-six sont condamnées à perpétuité et six à vingt ans de prison. Le principal complice, lui, a pris la fuite vers l’Europe et n’a jamais été jugé. Idem pour les commanditaires de l’assassinat. Tous ceux qui se sont penchés sur le dossier doutent que ceux qui sont en prison à Kinshasa soient les véritables coupables.
Pourtant, 14 ans après, 43 personnes sont toujours derrière les barreaux. Car certaines ont réussi à fuir. En 2003, le juge déclarait lui-même que le dossier n’était pas clos. Depuis dix ans, les avocats et les organisations de protection des droits de l’homme demandent donc à ce que ces personnes soient rejugées dans un procès équitable au nom du droit à la défense ou, étant donné que les faits sont vieux de 14 ans, qu’elles soient tout simplement amnistiées.
Sept condamnés morts en détention
En 2005, une loi d’amnistie pour faits de guerre, infraction politique et délits d’opinion a été adoptée. En 2014 aussi. Mais à chaque fois les condamnés pour l’assassinat de Kabila père ont été exclus de ces amnisties. Les gouvernements se succèdent et rien ne se passe. Pendant ce temps, les détenus continuent de croupir en prison. Sept déjà sont morts en détention.
En 2013, une ONG congolaise l’Asadho (Association africaine de défense des droits del’homme) saisit cette fois la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, une institution de l’Union africaine dont la RDC fait partie. Pour la première fois, une instance internationale prend position sur ce dossier délicat de la justice congolaise. Sa décision rejoint en tout point ce que disent les ONG congolaises depuis des années. Pour elle, le procès n’a pas été équitable et les droits des prévenus non respectés.
Les 43 détenus encore vivants doivent donc être immédiatement libérés. Ils doivent être indemnisés par l’Etat congolais. Enfin, la cour militaire congolaise doit être mise aux normes d’un Etat de droit pour qu’un procès équitable puisse être rouvert.
La Commission africaine des droits de l’homme donne 180 jours (6 mois) à ses Etats membres pour mettre en application ses recommandations. Mais plus d’un an après cette décision qui date de novembre 2013, rien. Aucune mesure n’a été prise. Le ministère de la Justice que nous avons contacté jeudi n’a pas été en mesure de réagir à ce nouvel élément. Le porte-parole du gouvernement, Lambert Mendé, a dit de son côté que son Etat refusait les injonctions. Les ONG congolaises réfléchissent à d’autres voies de recours au niveau de la justice internationale.