La cérémonie d’ouverture s’est terminée en début d’après-midi, ce lundi, avec comme principal message un appel à cesser immédiatement les hostilités. Dans son discours, la présidente de transition en Centrafrique Catherine Samba-Panza l’a répété : « Le moment est venu d’arrêter les hostilités, a-t-elle dit, d’arrêter les exactions de toutes sortes ». Le Premier ministre tchadien, Kalzeubé Pahimi Deubet a parlé d’une opportunité historique, en appelant à ce que cette période bénie du ramadan inspire tout le monde pour rechercher la paix. Enfin, le président congolais, médiateur dans cette crise, Denis Sassou-Nguesso, a parlé d’un point de non-retour et demandé à ce que les groupes qui combattent en Centrafrique s’engagent ici à faire taire les armes.
Pendant trois jours, il va donc être question de paix. Au programme, surtout, un accord qui prévoit que les groupes armés renoncent aux violences et acceptent, dans des conditions qui restent à préciser ultérieurement, de déposer les armes et de regrouper leurs hommes. « C’est le début d’un processus, estime Abdoulaye Hissène membre de la délégation de la Seleka à Brazzaville. On va d’abord signer l’accord de cessation des hostilités. On verra ensuite avec la communauté internationale dans quel contexte et avec quels moyens on va négocier le désarmement. C’est un processus qui va prendre du temps dans le cadre d’un DDR (Désarmement Démobilisation Réinsertion). C’est un désarmement organisé ».
Cesser les violences avant de négocier le désarmement, le cantonnement et la réinsertion des hommes, voilà qui paraît compliqué à faire accepter par les hiérarchies de ces groupes armés à leurs bases. « Nous avons fait venir tous les responsables des provinces, à savoir Bambari, Bossangoa, Berbérati, Carnot, Bouar… Tous, ils sont ici, explique Sébastien Wenezoui, le coordinateur général adjoint de la mouvance anti-balaka. Donc, on va leur inculquer de respecter les termes de l’accord que nous avons signés. Sur le terrain, on va également leur donner des mandats et des ordres pour qu’ils fassent appliquer cela, même par les brebis galeuses qui peuvent ne pas respecter nos ordres. On va se faire respecter ».
Le dialogue politique dans un second temps
Le gros du travail à Brazzaville tournera autour des violences armées et des questions « militaires ». Pour ce qui est de la politique, avec le grand dialogue national qui devra s’ouvrir un jour, on verra plus tard, et ailleurs. Notamment à Bangui. Ceux qui étaient hostiles à la tenue d'un nouveau sommet régional pour régler ces questions centrafricano-centrafricaines ont obtenu que Brazzaville se borne à un service minimum sur ce point. En fait, les participants s’engageront simplement à prendre part à ce dialogue national, sur le sol centrafricain. Il n’est plus question de définir à Brazzaville les contours d’un nouveau cadre de la transition ni de discuter ouvertement d’un réaménagement du gouvernement.
Certains ont donc refusé de se rendre à Brazzaville considérant que c’était une perte de temps et d’argent. C’est le cas de Gervais Lakosso, qui préside le groupe de travail de la société civile sur la crise en RCA, et qui a encore en travers de la gorge le sommet de Libreville qui a jeté les bases de la transition en janvier 2013, et celui de Ndjamena, un an plus tard, au cours duquel le Conseil national de transition avait été amené par avion pour pousser vers la sortie le président, issu de la Seleka, Michel Djotodia.
« Nous espérons qu'en dehors de la signature de cet accord de cessation des hostilités, on ne reproduira pas des accords secrets ou des démarches cachées, confie celui qui est aussi membre du CNT, le Parlement de transition. Et donc aller accompagner, observer la signature de cet accord, à quoi bon ? Parce que Brazzaville ce n’est que ça, ce n’est que la signature des accords de cessation des hostilités, des exactions. Nous, nous attendons ici pour la suite du programme. Refuser d’aller à Brazzaville, pour nous, ce n’est pas sortir du processus. Mais cette première étape, nous préférons l’observer à distance ».
Les grands absents de Brazzaville
Si les réfractaires qui ont refusé de se laisser convaincre jusqu’à la fin sont minoritaires en nombre, leur absence peut être remarquée. Ainsi parmi les partis politiques, le débat a été long - une dizaine de jours - et parfois houleux. Il y a ceux qui, comme le KNK fondé par François Bozizé, ont tenu à assister à cette séquence que beaucoup espèrent historique. Ceux qui ont fini par en accepter l’idée, après avoir obtenu une modification de l’ordre du jour.
Et puis il y a, ceux comme l'ancienne opposition réunie au sein de l'AFDT (Alliance des forces démocratiques de la transition) qui regroupe notamment les partis des anciens Premiers ministres Martin Ziguélé (MLPC) et Nicolas Tiangaye (CRPS), qui ne voient pas l'intérêt d'un tel sommet hors de Centrafrique. Mais qu'ils aient ou non décidé de faire le voyage de Brazzaville, tout le monde est à peu près d'accord : ce Forum est l'amorce d'un processus qui doit inclure le plus de Centrafricains possible et qui cette fois, espèrent-ils, débouchera sur la paix. Tous promettent d'ailleurs de participer à ce processus dès qu'il reprendra à Bangui, dans les semaines qui viennent.