Présidentielle en Algérie: Ali Benflis, serein mais vigilant

Alors que l’Algérie est à la veille de l’élection présidentielle, le principal rival d’Abdelaziz Bouteflika, Ali Benflis, a prévenu lors d’une conférence de presse mardi 15 avril qu’il ne se tairait pas en cas de fraude, tout en restant pacifiste.

Ali Benflis n’est sûr de rien, mais il est serein. Ce sont les mots qu’il a employés mardi matin lors d’une conférence de presse à Alger. Il affirme avoir les moyens de surveiller le scrutin grâce à ses représentants qui seront déployés dans la quasi-totalité des 60 000 bureaux de vote. « Ce sont des jeunes armés jusqu’aux dents, armés de leur propre conviction », précise-t-il, avant d’ajouter : « Ils feront tout pour surveiller les urnes et barrer la route à la fraude. »

En cas de fraude avérée, Ali Benflis prévient : il ne restera pas les bras croisés. Mais pour couper court aux accusations du pouvoir, il précise qu’il n’appellera jamais à la violence. Pacifique, mais ferme et vigilant, telle est l’image que l’homme a voulu encore donner ce matin. Comme pour prouver qu’il n’est pas un lièvre dans cette aventure électorale.

Le mystère Benflis

Car beaucoup s’interrogent sur sa candidature et voient en lui une caution au régime. En 2004, Ali Benflis, ancien Premier ministre d’Abdelaziz Bouteflika et ancien secrétaire général du FLN, avait subi un échec cuisant. En rupture avec le président, il s’était porté candidat contre lui, mais n’avait récolté officiellement que 6 % des voix. Pour lui, c’est « la fraude qui est sortie vainqueur du scrutin ». Mais le système n’ayant pas vraiment changé depuis, beaucoup se demandent pourquoi il s’est à nouveau porté candidat cette année. D’autant qu’il dénonce déjà des irrégularités dans la préparation du vote.

Croit-il sincèrement pouvoir gagner ? C’est ce qu’il dit, « parce que le contexte n’est plus le même que 2004 », parce que les révolutions arabes sont passées par là et qu’à l’ère d’Internet et de Facebook, les gens ne se laisseront pas voler la victoire. Malgré tout, certains doutent qu’un homme venu du sérail comme lui se fasse des illusions sur les résultats. Que cherche-t-il alors ? C’est un peu ce qu’on pourrait appeler le mystère Benflis.

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Depuis plusieurs jours, en tout cas, la bataille est engagée entre Ali Benflis et Abdelaziz Bouteflika. Les deux camps se sont livrés à un échange d’amabilités, l’un mettant en garde ceux qui chercheraient à frauder le jour J, l’autre dénonçant des intimidations et des menaces. Un climat qui en dit long sur leurs différends. À moins que cela ne soit encore une fois qu’une juste répartition des rôles dans une pièce qui serait écrite d’avance et dans laquelle les deux hommes feraient semblant d’être opposés alors qu’ils cheminent en fait vers un accord secret. L’hypothèse n’est pas à exclure. Ce qui est indéniable, c’est qu’Ali Benflis affiche chaque jour un peu plus sa volonté de se démarquer du système actuel.

Quid en cas de défaite ?

En cas de défaite, Ali Benflis compte rester sur la scène politique. Il a clairement affirmé ce mardi matin. Après son échec de 2004, il s’était retiré de la vie publique pendant dix ans. Cette fois-ci, prévient-il, il faudra compter avec lui. Il promet de continuer le combat, en s’associant avec ceux qui l’ont soutenu dans cette campagne, ainsi qu’avec ceux qui ont prôné le boycott du scrutin. Lorsqu’on lui demande s’il pourrait accepter un poste de Premier ministre, ou de vice-président, Ali Benflis répond que c’est la légitimité du peuple qu’il cherche et que sa conception du pouvoir n’est pas d’arriver par le haut. C’est pourtant ce qui s’est passé en l’an 2000 quand Abdelaziz Boutefika l’a nommé Premier ministre.

L’une des principales inconnues de ce scrutin est le score dont il sera crédité. Ce résultat déterminera sans doute ce qui se passera dans la rue après le vote. Un score qui en dira aussi long sur l’état d’esprit dans lequel est le pouvoir actuellement.

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