Les critères d’éligibilité sont en cours de négociation et seront validés par le Parlement, jeudi 16 janvier. Les candidats ont jusqu'à jeudi 16 h pour déposer leur dossier. Selon la présidente du Conseil national de transition (CNT), Léa Koyassoum Doumta, un consensus serait déjà atteint pour que les leaders politiques, les ministres ou chefs de parti ne puissent pas se présenter. Une exclusion qui concerne également les militaires, les hauts responsables de la transition, les membres du bureau du CNT, ainsi que toute personne ayant participé à une milice ou rébellion armée ces vingt dernières années.
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C'est au nom du comité technique de suivi - c'est-à-dire de la communauté internationale - que le représentant du médiateur congolais, le général Essongo, a élargi cette liste aux membres du CNT, au motif qu'ils seraient avantagés par rapport aux candidats extérieurs. En effet, ces conseillers sont chargés de désigner, par le vote, le prochain président de transition et risqueraient donc d’être juge et partie.
Alexandre-Ferdinand Nguendet se retire officiellement de la course
Léa Koyassoum Doumta, la présidente par intérim du CNT, a assuré que les 134 conseillers ont accepté le principe de leur propre inéligibilité. Un principe auquel certains conseillers sont cependant toujours opposés.
Mercredi matin, Alexandre-Ferdinand Nguendet, président de la transition par intérim, a accepté de se retirer de la course. « Les critères d'éligibilité l'en auraient empêché », précise-t-on de source diplomatique. Mais, dans l'entourage d’Alexandre-Ferdinand Nguendet, on indique s'être plié à la demande de la communauté internationale.
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Ce débat sur les critères d'éligibilité, plus long que prévu, pourrait entraîner un report de l’élection du président par les conseillers. Initialement prévue samedi, elle pourrait être reportée à dimanche 19 ou lundi 20 janvier.
Les anti-balaka veulent être intégrés au processus
Le calendrier, comme le processus, sont contestés par les anti-balaka. Le lieutenant Konaté, l'un des responsables du mouvement, juge que le CNT n'est pas indépendant et que les anti-balaka doivent être intégrés au processus. Pour lui, Michel Djotodia a « mis en place des institutions sur lesquelles il avait l’œil, à l’instar du CNT », dont il accuse « la majorité des membres » d’être « des gens imposés par Djotodia et Tiangaye ».
« Nous demandons la reconsidération totale du CNT qui devrait prendre en compte toutes les sensibilités du pays, et les nouvelles forces des anti-balaka. Et ceci avant l’élection des nouveaux dirigeants », a-t-il déclaré au micro de RFI. « Si on décide de passer vite à l’élection, ce samedi, c’est trop tôt », juge-t-il, estimant qu’il faut « faire un travail sérieux pour que le peuple, tout le monde, se rassemble, et que l’on oublie la violence une fois pour toutes ».
Les ex-Seleka affichent une volonté de dialogue
Du côté des ex-Seleka, le ton est à l'apaisement. Interrogé par RFI, le général Ba, l'un des chefs des ex-rebelles, affirme que le mouvement est prêt à déposer les armes et à se mettre au service du futur président de transition. « Les Seleka ne sont pas là seulement que pour Michel [Djotodia]. Ce sont des fils du pays, et ils sont là pour servir leur pays et pour accompagner le nouveau président de la transition », expose-t-il. On a les bras ouverts. On doit travailler, aujourd’hui, ensemble. A mes frères des FACA [Forces armées centrafricaines, autrefois loyales à l’ancien président François Bozizé, ndlr] qui sont partis rejoindre les anti-balaka , il faut oublier tout ça. […] Il faut qu’on laisse tout ça à Dieu. On veut la paix. Les anti-balaka n’ont qu’à déposer leurs armes. Et nous, nous sommes là et on est prêts à déposer les armes sans discussion. »
La RCA au centre du sommet de Luanda
La Centrafrique a également été au cœur du sommet des pays de la région des Grands Lacs, qui s’est tenu ce mercredi à Luanda, capitale de l’Angola. Les présidents de la République démocratique du Congo, du Rwanda, de l’Ouganda, de l’Angola et de l’Afrique du Sud étaient rassemblés pour parler de la sécurité dans la région et aborder, outre la RCA, la situation au Soudan du Sud et en RDC.
L’Union africaine a saisi l’occasion de ce sommet pour plaider - en vain - pour un renforcement de la mission présente en Centrafrique, sollicitant la contribution des pays voisins et de la région. Les pays présents n’ont pris aucun engagement concret, réaffirmant seulement « la nécessité de la paix et de la stabilité pour le bon développement de la région ».
« L’Union africaine demeure profondément préoccupée. Elle en appelle à votre autorité pour donner les moyens à la Misca [la Mission internationale de soutien à la Centrafrique, ndlr], dont les effectifs ont été projetés à 6 000 hommes, de poursuivre son mandat en toute sérénité », a déclaré le représentant spécial de l'Union africaine pour la région des Grands Lacs, Boubacar Diarra.
Misca : 4 400 hommes sur les 6 000 attendus
Une demande adressée notamment directement à l’Afrique du Sud, déjà engagée en République démocratique du Congo et au Darfour, ainsi qu’à l’Angola, puissance régionale montante. La mission internationale de soutien à la Centrafrique ne dispose en effet pour le moment que de 4 400 hommes, sur les 6 000 prévus. « Il est clair que l'Angola va concentrer son aide dans le domaine humanitaire, mais également soutenir le processus de pacification et de transition vers la démocratie », a répondu le président angolais, José Eduardo dos Santos.
Dans leur déclaration finale, les pays sont même allés jusqu’à renvoyer la balle à l’Union africaine en lui demandant de renforcer les moyens de la Misca.
■ ZOOM : A Cotonou, Djotodia se fait discret
Michel Djotodia, l’ancien président auto-proclamé de la République centrafricaine, est arrivé samedi 11 janvier au Bénin. Un pays qui l’avait déjà accueilli et d’où sa femme est originaire. A Abomey Calavi, une commune limitrophe de Cotonou, où il vit depuis son arrivée, sa présence se fait discrète.
Il habite une maison blanche, dans un quartier résidentiel. Une guérite nouvellement construite abrite un militaire béninois. Ils sont plusieurs à garder la maison. Il y a des motos devant l’entrée et deux petites voitures garées devant la clôture de la maison, sur une piste en terre rouge.
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Michel Djotodia ne reçoit pas de journalistes. Un membre de sa garde rapprochée explique qu’il « n’est plus au pouvoir » et qu’il « se repose ». Selon un voisin rencontré par RFI, ce nouvel habitant est discret. « Selon ce que j’ai vu, c’est le samedi passé qu’il est arrivé », confirme-t-il. « Il paraît que sa femme était là depuis un mois, déjà », avance-t-il. Dans le quartier, « peu de gens savent s’il est là ou pas. Ça n’a rien changé. »
De fait, la vie suit son cours dans cette rue d’Abomey Calavi. Juste en face de la maison, l’atelier de soudure est en activité et les conducteurs de taxi-motos se reposent à l’ombre d’un manguier. Les proches voisins refusent de donner leur avis sur la présence de Michel Djotodia. Sauf un. « Ça ne pose pas de problème », juge-t-il, mais il avoue ses craintes, « si, à la longue, on des problèmes avec, par exemple, les Etats-Unis, les pays occidentaux qui refusent ça. »