Au début des années 1990, Taiwan et la Chine continentale ont tenté de rivaliser en Afrique par la politique du carnet de chèque. Les deux frères ennemis chinois s'efforçaient d'obtenir le soutien des pays du continent en leur proposant l'aide au développement la plus séduisante, ou en faisant des dons aux partis aux pouvoirs.
Vingt ans plus tard, le rapport de force géopolitique a changé. La Chine est devenue une puissance incontournable. Et pour Sven Grimm, le directeur du Centre des études chinoises à l'université de Stellenbosch, en Afrique du Sud, cela éloigne naturellement les pays africains de Taipei.
« L'avenir se trouve du côté de Pékin »
Le spécialiste des relations sino-africaines Adama Gaye fait la même analyse : « En réalité, explique l'essayiste sénégalais, Yahya Jammeh a eu ce qu'il pouvait tirer de Taiwan : un aéroport, des infrastructures routières, hospitalières et autres investissements. Maintenant la Gambie sait qu'il n'y a plus grand-chose à tirer de Taiwan et que le vent a tourné. L'avenir se trouve du côté de Pékin. Par réalisme froid, le régime de Yahya Jammeh a compris qu'il fallait se mettre du côté de Pékin ».
►à (ré)écouter : Adama Gaye était l'Invité Afrique de RFI sur les relations Chine-Afrique
L'ancien ministre des Affaires étrangères gambien en exil, Mamadou Lamine Diop, estime pour sa part que de telles analyses donnent trop de cohérence à la diplomatie gambienne. Or, cette diplomatie, dit-il, est gérée de manière impulsive par le président gambien Yahya Jammeh. L'ancien ministre rappelle que le vice-président avait été envoyé en octobre à Taiwan. Et s'interroge : en rompant avec Taipei, Jammeh ne fait-il pas que réagir sur un coup de tête aux résultats de cette rencontre ?