A Nzérékoré, la capitale régionale, la situation reste tendue. Le couvre-feu de cette nuit a, semble-t-il, produit des effets, mais dès le jour revenu, le couvercle a à nouveau explosé et on entendait à nouveau des coups de feu dans au moins deux quartiers de la ville. « Un calme précaire règne, mais on entend beaucoup de coups de feu. Le temps que j’étais à la morgue pour voir les corps exposés, deux à trois corps sont arrivés, et le ramassage n’est pas terminé », raconte un habitant.
Cinquante quatre corps ont été identifiés à l'hôpital central de Nzérékoré, a affirmé un médecin, d'autres corps non identifiés sont encore à la morgue. Les troubles qui avaient éclaté dans la localité de Kolé dimanche se sont aussi étendus à celle de Beyla, plus au nord, où selon certains témoins l'église catholique aurait subi des dommages. Notez d'ailleurs qu'à Nzerékoré, trois mosquées et deux églises ont été brûlées ainsi que des dizaines de boutiques.
Les deux militaires de haut rang, Claude Pivi et Tiégboro Camara, le premier d'ethnie Guerzé et le second d'ethnie Konianké, qui ont été dépêchés sur place, font la navette entre les différents points chauds de la région. Gendarmes et militaires sont déployés conformément aux vœux du président. Ils ont cependant du mal à contrôler toute la ville de Nzérékoré, qui est immense et peuplée de près de 500 000 habitants.
Une explosion de violence
Il faut savoir que les Guerzés et les Koniankés, qui sont en fait des Malinkés installés dans la région depuis des siècles, vivent en bonne entente la plupart du temps mais, depuis quelques années, la tension monte entre les deux groupes. En 1991 déjà les violences avaient fait deux cents morts. Pourquoi cette montée de la violence ? Sans doute parce que la Guinée forestière est victime comme l'ensemble du pays d'un repli identitaire et d'une crispation communautaire d'autant plus vifs que le pays est confronté à une grave crise économique.
Pour le président Alpha Condé, la situation est alarmante. Il a lancé mardi un appel au calme, invitant les Guinéens à rester unis et à éviter les divisions.