Dix-neuf ans après le génocide commis contre les Tutsis au Rwanda, des ONG françaises demandent l’ouverture d’une enquête qui vise un ex-gendarme de la cellule de la présidence française, reconverti dans le privé. Le capitaine Paul Barril – qui vit aujourd’hui à Londres – a conclu un contrat, le 28 mai 1994, avec Jean Kambanda, Premier ministre du gouvernement intérimaire rwandais.
Le contrat prévoit la livraison d’une grande quantité de munitions, d’obus et mortiers, de grenades d’un montant de 3,13 millions de dollars. Seul un acompte de 1,2 million aurait été versé et le contrat non exécuté. L’opération française Turquoise, déclenchée en juin par Paris, l’en a empêché.
Joint par RFI, Patrick Baudoin, président d’honneur de la FIDH, estime que « ce contrat justifie à lui seul l’ouverture d’une enquête préliminaire » et dénonce « la conclusion et l’exécution partielle, par Paul Barril, de ce contrat de fourniture d’armes et de munitions ; de formation et d’encadrement » en pleine période du génocide rwandais.
Un contrat d’assistance dont on mesure toute la dimension si l’on tient compte de la chronologie des événements. Le 6 avril 1994, l’avion du président rwandais Habyarimana est abattu, donnant le signal pour l’extermination de près de 800 000 Tutsis. Ce jour-là, Paul Barril se trouve sur « une colline perdue au centre de l’Afrique », écrira-t-il dans ses mémoires. Le 17 mai 1994, le Conseil de sécurité des Nations unies adopte un embargo interdisant la vente et la livraison d’armes. Paul Barril réussit à passer outre.
« Paul Barril avait des liens étroits avec le gouvernement d’Habyarimana. Il a conservé ces liens pendant la période du génocide ; il avait toute son équipe de mercenaires. Donc, c’est vraiment un soutien qui nous paraît marquer - ce que l’on appelle dans la plainte pour la qualifier pénalement - une complexité de génocide », a déclaré à RFI Patrick Baudoin.
Paul Barril a déjà été entendu à plusieurs reprises par la justice française comme témoin dans l’enquête sur l’attentat contre l’avion du président Habyarimana. Pour la FIDH, il est temps que la justice française enquête, non seulement comme c’est déjà le cas sur des génocidaires rwandais se trouvant en France mais aussi sur des responsabilités qui peuvent être des responsabilités individuelles de ressortissants français et en l’espèce de Paul Barril.