Tunisie : d’immenses défis persistent après la révolution

L’International Crisis Group (ICG) appelle la Tunisie à relever d’importants défis sociaux et économiques, dans un rapport publié le 6 juin. Selon ICG, la Tunisie est sur le chemin d’une transition politique réussie mais les problèmes liés au chômage, à la sécurité et à l’impunité sont encore immenses. Ils risquent d’entraver, voire d’interrompre la marche en avant de la Tunisie.

Dans un contexte arabe marqué par des transitions bâclées ou sanglantes, la Tunisie fait encore figure d’exception, explique le rapport intitulé « Tunisie : lutter contre l’impunité, restaurer la sécurité ». L'ICG analyse la situation actuelle du pays et pointe des signes de progrès tels que les élections libres qui ont eu lieu ; l’opposition d’hier qui est aujourd’hui au pouvoir, la société civile qui s’organise ou encore la liberté d’expression qui prend ses marques y compris pour critiquer les orientations de la coalition composée par les islamistes et leurs alliés de gauche qui dominent l’Assemblée nationale et le gouvernement.

Les énormes défis économiques et sociaux

L’organisation fait état d’une transition politique réussie mais elle énumère aussi des problèmes inquiétants qui demeurent tels que « le chômage qui continue d’augmenter, les inégalités régionales criantes et la corruption ».

Au premier trimestre 2012, la Tunisie connaissait un taux de chômage dépassant les 18%. Parmi les 750 000 chômeurs dans le pays, environ 250 000 sont des diplômés. Une triste réalité qui révèle que « jusqu’ici, le gouvernement n’a pas été capable de répondre rapidement à ces problèmes et a échoué à apaiser l’impatience des travailleurs et des jeunes chômeurs qui espèrent les fruits de leur implication dans la lutte » contre l’ancien régime, ajoute l’organisation.

L’ICG pointe aussi la faiblesse de la présence de l’Etat dans les régions intérieures et son incapacité à « faire face à la corruption » et « résoudre le problème du secteur informel, y compris la contrebande ». L’organisation reconnaît également « la marge étroite du gouvernement » en citant « l’inertie bureaucratique, ainsi que les sit in et mouvements de protestation de toutes sortes » qui entravent son action.

Joint par RFI, William Lawrence qui dirige le projet Afrique du Nord de l’ICG, évoque ce mécontentement et ces dysfonctionnements de l’économie tunisienne qui risquent de provoquer une crise de légitimité et de mettre en péril le gouvernement.

 
Lutter contre l’impunité et restaurer la sécurité

L’ICG précise que, parmi les défis qui pourraient menacer les progrès enregistrés en Tunisie, deux, en particulier, sont étroitement liés : la sécurité et la question de la justice.

La sécurité reste fragile, précise le rapport, et une partie des forces de l’ordre est soupçonnée de loyauté envers l’ancien régime. De son côte, Ennahda, parti au pouvoir, est accusé par ses adversaires politiques de fermer les yeux sur certaines violences à connotation religieuse.

Par ailleurs, la police reste, en grande partie, absente dans les régions centrales et du sud-ouest du pays et la sécurité est souvent assurée par l’armée. Des troubles réguliers, dont les origines peuvent être tout à la fois sociales, claniques, mafieuses ou encore liées à de nouvelles formes d’extrémisme religieux, « viennent ternir l’image d’une transition majoritairement pacifique », relève l’ICG.

En dépit de ce « contexte morose et d’une révolution qui a été économiquement dévastatrice pour le pays », l’organisation estime qu’il « serait exagéré d’agiter le spectre d’une deuxième révolution » car « l’Etat et la société ont tenu. Les institutions financières, les entreprises fonctionnent et le tourisme montre des signes de reprise », souligne l’ICG.

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