Abdoulaye Wade admet la possibilité d'un second tour, ses opposants sont sceptiques

Le président sénégalais Abdoulaye Wade, qui brigue un troisième mandat, s'est exprimé ce lundi 27 février, lors d'une déclaration à la presse au lendemain du premier tour de la présidentielle. Une intervention au palais présidentiel à Dakar, alors que l'opposition et les médias sénégalais affirmaient qu'un second tour est « inévitable » entre le chef de l'Etat sortant et son ancien Premier ministre devenu opposant, Macky Sall. Ses opposants n'ont pas été convaincus par son intervention.

Avec nos envoyés spéciaux et notre correspondant à Dakar,

Abdoulaye Wade a admis la possibilité d'un second tour en précisant que « tout est encore possible », sa victoire au premier tour ou au second.

La déclaration d’Abdoulaye Wade va probablement calmer le jeu politique à un moment où certains de ses lieutenants étaient tentés d’annoncer une victoire immédiate.

Ce que l’on peut retenir aussi c’est que Abdoulaye Wade a indiqué dans cette déclaration que dans l’état actuel des dépouillements, c’est-à-dire environ la moitié des collectivités locales du pays, son score s’élève à 32,17% des suffrages, il arrive donc premier. Le suivant, dont Wade ne révèle pas l’identité, fait un score pour l’instant  assez proche : 25,24% des votes.

L’hypothèse d’un second tour n’est donc pas exclue par le sortant. Abdoulaye Wade a dit d’ailleurs que dans une telle hypothèse le Parti démocratique sénégalais (PDS) et ses alliés vont « explorer toutes les possibilités d’entente avec d’autres forces politiques pour assurer les conditions d’une victoire finale ».

« Tous les défis de l’élection ont été relevés»

Le président sortant a aussi rendu hommage aux Sénégalais qui ont été nombreux à se rendre aux urnes dimanche dans le calme, la discipline et la sérénité. Selon lui, le scrutin a montré que le Sénégal restait ancré dans le cercle restreint des démocraties apaisées. 

« Le Sénégal a démenti les oiseaux de mauvais augures », a dit Abdoulaye Wade. Il s’est félicité de l’organisation du scrutin, de la transparence, du respect du calendrier : « Tous les défis de l’élection ont été relevés », selon le président Wade.

« Je salue et respecte les autres candidats et les compatriotes qui ont porté leur choix sur eux. C'est là l'expression normale du pluralisme démocratique pour lequel je me suis toujours battu pendant les moments difficiles que j'ai passés dans l'opposition », a-t-il poursuivi.

La rue soulagée, les opposants sceptiques

Grand Dakar, Fass, Gueule-Tapée et Médina : dans les quartiers populaires de Dakar, les habitants sont soulagés. Soulagés d’avoir entendu à la radio un président candidat reconnaître l’évidence, à savoir, la très forte probabilité d’un second tour.

Beaucoup de Dakarois redoutaient un passage en force du président, une explosion de colère, une crise politique. Les propos d’Abdoulaye Wade et sa posture mi-chef d’Etat, mi-candidat ont donc rassuré et apaisé les craintes. Le système électoral sénégalais est si bien rôdé, disent les Dakarois que l’on ne peut pas maquiller la réalité.

Dans les rues, les partisans d'Abdoulaye Wade louent ses qualités d’homme d’Etat et son grand respect pour la démocratie. Ses opposants, en revanche, affirment qu’il n’avait pas d’autre choix que de reconnaître la réalité.

Pour Cheikh Tidiane Gadio, candidat à la présidentielle, qui a été ministre des Affaires étrangères d'Abdoulaye Wade jusqu'en 2009 et qui en est devenu un farouche  opposant, estime que la déclaration du chef de l'Etat n'apporte rien.

Pour Seydou Gueye, porte-parole de Macky Sall, le président sortant s'est d'abord adressé à son propre camp. Il estime « quasi-nulle » la probabilité de voir Wade l'emporter au premier tour.

De son côté, la porte-parole de Moustapha Niasse, un autre candidat, est très sceptique. « Wade nous a habitués à tellement de manipulations qu'on ne peut pas avoir confiance. Il cherche à gagner du temps », assure-t-elle.

Certains regrettent qu’Abdoulaye Wade n’ait pas eu un seul mot pour les personnes tuées lors des violences préélectorales. La campagne fut en effet la plus violente dans l’histoire politique du Sénégal. Un second tour se profile donc au Sénégal, et à Dakar beaucoup appellent à rester mobilisés et vigilants.

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