Hichem Gacem, 25 ans, vendeur ambulant de lunettes, s’est immolé il y a une semaine, jeudi 26 janvier, à 10 heures du matin, dans un quartier de la ville de Tiaret, à 350 kilomètres à l’ouest d’Alger. Suite à une altercation avec un policier qui a renversé son étal d’un coup de pied, le jeune vendeur s’est aspergé d’essence qu’il a enflammée. Quelques jours plus tard, il a succombé à ses brûlures à l’hôpital d’Oran. Le jour de ses obsèques, le mardi 31 janvier, a été marqué par des violences entre des habitants et la police qui ont fait plusieurs blessés, selon le quotidien arabophone algérien El-Khabar.
Joint au téléphone par RFI, un habitant de Tiaret, qui a voulu garder l’anonymat, nous explique que le cas du jeune Hichem Gacem est révélateur du malaise de la jeunesse. Diplômés ou pas, ils sont confrontés au chômage ou encore à des situations où ils sont exploités et instrumentalisés. C’est le cas précisément, nous dit cet habitant de Tiaret, des vendeurs ambulants.
Il appelle à une mobilisation des autorités locales, de la société civile et des partenaires sociaux pour que « des solutions durables et palpables sur le terrain » soient trouvées. En Algérie, le taux de chômage chez les jeunes est aujourd’hui de 21%, selon le Fonds monétaire international. Tiaret est une ville de plus de 250 000 habitants où le désarroi d'une jeunesse qui se sent totalement délaissée est réel...
Selon le journal El-Khabar, les violences, qui ont débuté mardi après-midi à Tiaret après l’enterrement de Hichem Gacem, se sont étendues, le lendemain, aux localités voisines de Sougueur et de Rahaouiya où des jeunes ont bloqué plusieurs routes.
Plusieurs dizaines de tentatives d’immolation
Les tentatives d’immolation se sont multipliées depuis janvier en Algérie et ont touché y compris des lycéens. La presse algérienne a comptabilisé plusieurs dizaines de tentatives dont un nombre indéterminé ont été mortelles. Plus d’une trentaine d’Algériens se seraient ainsi immolés dans plusieurs régions d’Algérie pour protester contre la vie chère, le chômage et la « hogra » (l’injustice).
L’Algérie est parvenue jusqu’ici à contenir le vent de révolte qui souffle dans le monde arabe, mais le pays connaît des explosions de colère récurrentes et dispersées.
Cette vague d’auto-immolations a gagné le pays après le suicide, par le feu, en Tunisie, du jeune Mohamed Bouazizi qui a marqué le début de la révolution tunisienne. Lui aussi était un marchand ambulant de 26 ans ; le 17 décembre 2010 il s’était fait confisquer sa charrette par la police municipale et s’était immolé par le feu devant le gouvernorat à Sidi Bouzid. Son suicide a eu, depuis, une répercussion politique sans précédent.