La décision a été prise à Arusha, la semaine dernière mais rendue publique que ce lundi 19 décembre. Elle concerne Jean-Bosco Uwikindi, pasteur d'une église pentecôtiste de la région de Kigali en 1994, et accusé de génocide et d’extermination. Il avait été arrêté en Ouganda et transféré au Tribunal pénal international en 2010.
Son procès aura donc lieu à Kigali. Voilà des années que les autorités rwandaises demandent à pouvoir juger elles-mêmes des accusés du TPIR. Jusqu'ici, le Tribunal s'y était toujours refusé. Par le passé, les juges s'étaient opposé au renvoi de cinq autres présumés génocidaires, estimant que les garanties d'un procès équitable n'étaient pas réunies à Kigali.
Cette fois, les juges ont donc accepté de confier un accusé à la justice rwandaise. Une décision qui enchante Kigali. « C'est quelque chose qu'on avait demandé parce qu'on aimerait que les gens qui sont poursuivis soient jugés au Rwanda, là où les infractions ont été commises », se réjouit le porte-parole du parquet général rwandais, Alain Mukurarinda. Pour lui, cette décision est due aux réformes entreprises dans le pays, sur le plan judiciaire notamment. « Maintenant la compétence est là, il était normal de prendre pareille décision ».
Au Rwanda, selon ses avocats, Jean-Bosco Uwikindi a déjà été condamné par contumace à perpétuité par les tribunaux gacaca. Pour Me Claver Sindayigaya, son client ne pourra pas avoir un procès équitable au Rwanda.« Il a identifié un certain nombre de témoins potentiels qui veulent venir faire la lumière sur ce qui s'est passé, explique l'homme de loi. 95% de ces témoins résident à l'extérieur du Rwanda. Ce sont soit des réfugiés, soit des demandeurs d'asile. Ils ont tous dit qu'ils ne viendraient pas risquer leur vie au Rwanda ».
Human Rights Watch également dubitative
L'organisation de défense des droits de l'homme, Human Rights Watch, considère elle aussi que les réformes entreprises par le Rwanda ne suffisent pas à garantir des procès équitables aux présumés génocidaires rwandais.
Quoi qu'il en soit, ce premier transfert en laisse présager d'autres en provenance du TPIR qui ferme ses portes en 2014, mais peut-être aussi en provenance de pays occcidentaux. La décision du TPIR risque en effet de faire jurisprudence, d'autant que la Cour européenne des droits de l'homme, il y a deux mois, s'est elle aussi prononcée pour le renvoi devant les tribunaux rwandais d'un présumé génocidaire arrêté en Suède.