Immigration, trafic d’armes, terrorisme… les conséquences de la guerre en Libye se font de plus en plus sentir et s’avèrent particulièrement déstabilisatrices pour le nord du continent africain. La menace sécuritaire apparaît certainement comme étant la plus inquiétante. La dissémination des armes libyennes entre les mains des islamistes d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) et le fait qu’ils se soient lourdement militarisés durant la crise libyenne, nourrit de lourdes craintes. Plusieurs gouvernements de la zone sahélo-saharienne affirment d’ailleurs que des groupes extrémistes ont mis la main sur des armes pillées dans des garnisons libyennes.
Déploiement des réseaux islamistes vers la Tunisie
Le dernier incident en Tunisie donne à penser que des réseaux islamistes en Algérie chercheraient à gagner la Tunisie. L’armée de l’air tunisienne a attaqué et neutralisé, ce mercredi 21 septembre 2011, un convoi armé de batteries anti-aériennes dans le sud de la Tunisie. Tôt dans la matinée, le convoi de neuf véhicules tout terrain avait ouvert le feu sur des hélicoptères de l’armée tunisienne qui a répliqué, faisant plusieurs morts.
Les incidents se sont produits dans une zone désertique que partagent la Tunisie et l’Algérie et qui n’est pas loin de la frontière avec la Libye. C’est également une zone propice aux trafics et une zone d’activité des jihadistes d’Aqmi.
Pour l’instant, l’identité du groupe n’a pas été révélée ; les opérations de ratissage de l’armée tunisienne se sont poursuivies ce jeudi. Interrogé par RFI, le colonel Ben Naceur précise qu’ils n’ont trouvé aucun corps et que le convoi provenait d’Algérie.
Notons que l’armée tunisienne a déjà été mise à l’épreuve cette année en matière de terrorisme. En mai dernier, dans le centre-ouest de la Tunisie, trois hommes armés qui portaient des ceintures d’explosifs et qui étaient en possession de passeports libyens, ont tiré sur des soldats tunisiens, faisant deux morts dont un colonel de l’armée tunisienne.
Une désorganisation sécuritaire
L’effondrement des régimes totalitaires connaissent forcément, ne serait-ce que momentanément, une période de désorganisation sécuritaire. C’est ce qui se passe en Tunisie. Par ailleurs, cette région du sud tunisien est particulièrement vulnérable et difficile à contrôler. Pour localiser et détecter des convois dans cette zone désertique et longue de milliers de kilomètres, il faut des moyens technologiques évolués. C’est donc une zone plus facile à traverser sans être repéré. Conscient de ce grave problème, Haykel Bouzuoita, porte- parole du ministère de la Défense tunisien, reconnait que l’armée doit redoubler de vigilance tout le long de ses frontières avec la Libye et l’Algérie.
Conséquences de la crise libyenne dans la région du Darfour
En début de semaine déjà, mardi 20 septembre 2011, c’était au tour de l’armée soudanaise de se voir confrontée à un convoi lourdement armé de rebelles du Mouvement pour la justice et l’égalité (JEM). Les rebelles circulaient à bord de deux gros véhicules, l’un rempli d’essence et l’autre d’armes dont ils s’étaient emparés en Libye. L’un des rebelles a été tué et les autres ont pris la fuite.
Depuis le début du conflit libyen, les rebelles du Darfour du JEM ne se sentaient plus en sécurité en Libye. Aussi, ont-ils commencé à rentrer au pays. La semaine dernière, le JEM annonçait le retour au Darfour de son chef, Khalil Ibrahim. Lui et ses hommes, avaient été accueillis par Mouammar Kadhafi au printemps 2010, après un passage par le Tchad. Aujourd’hui, ils se dépêchent de rentrer, mais pas les mains vides. A son retour, Khalil Ibrahim était escorté par une centaine de 4x4 lourdement armés.
Le représentant spécial de l’ONU pour l’Afrique centrale, Abou Moussa, avait exprimé, le 20 août 2011, devant les membres du Conseil de sécurité, son inquiétude sur les risques de déstabilisation de la région dus au conflit en Libye. Il avait notamment évoqué le risque « que des armes volées en provenance de Libye puissent être transférées dans les zones poreuses de la sous-région, et puissent servir à alimenter la criminalité et saper les récents développements de renforcement de la coopération entre le Tchad, le Soudan et la République centrafricaine ».