De notre correspondant à Dakar,
C’est officiel : les candidats à l’élection présidentielle sénégalaise de février prochain devront avancer 65 millions de francs CFA de caution pour pouvoir se présenter -une somme qui sera restituée à ceux qui auront obtenu 5% des suffrages-.
En 2007, lors du précédent scrutin présidentiel, ceux qui souhaitaient briguer les suffrages des électeurs avaient dû s’acquitter de 25 millions de francs CFA. Selon le ministère, ce chiffre a été revu à la hausse pour suivre une tendance générale en Afrique et limiter le nombre de petits candidats. «N’oublions pas que lors de la dernière élection présidentielle, chaque candidat avait coûté entre 250 et 300 millions de francs CFA à l’Etat» explique notre source.
Dénonciation unanime
Le montant de la caution pour les élections présidentielles sénégalaises a plus que décuplé depuis le début de l’alternance : 6 millions de francs CFA en 2000, 25 en 2007, 65 millions donc maintenant. Les candidats déclarés que RFI a pu joindre dénoncent unanimement cette nouvelle hausse.
Pour l’ancien ministre des Affaires étrangères sénégalais, Cheikhtidiane Gadio, une caution qui s'élève à 65 millions de francs CFA, cela est «indécent» et pose un problème de principe : «Dans une démocratie, dit-il, ce n’est pas l’Etat qui choisit les bons candidats et barre la route aux mauvais en augmentant le niveau de la caution. C’est aux électeurs de le faire, surtout dans une élection à deux tours. »
La candidate «société civile» Amsatou Sow Sidibé parle elle d’«une négation pure et simple de la démocratie». «Il y a, pense Amsatou Sow Sidibé, des candidatures crédibles que le régime veut bloquer parce qu’elles le gênent.»
Le spécialiste de la micro-finance Mansour Ndiaye, autre candidat déclaré, voit dans le montant de cette caution un avantage offert à tous ceux qui ont «volé de l’argent». L’avocat Moussa Diop souligne qu’il y avait d’autres voies possibles si on voulait limiter le nombre de candidats…
La majorité présidentielle répond à ces différentes critiques qu’il était temps d’essayer de rationnaliser la «boulimie électoraliste» qui frappe le pays. Selon le porte-parole de la Cap 21, Mame Mactar Gueye, «le chiffre de 65 millions tient compte des observations de la majorité et de l’opposition. Il permettra de décourager les farceurs». «Nous avons bon espoir maintenant, dit-il, de n’avoir que des candidats sérieux».