La Turquie se mobilise pour la Somalie

Depuis quelques années, la Turquie montre un intérêt de plus en plus important pour l’Afrique et plus particulièrement pour l’Afrique subsaharienne. Sur le plan diplomatique, le gouvernement joue à fond sa carte de leader régional et se mobilise désormais pour la Somalie touchée, tout comme la Corne de l’Afrique en général, par la sécheresse et la famine. Le Premier ministre, Recep Tayyip Erdogan, envisage même de se rendre à Mogadiscio la semaine prochaine.

Avec notre correspondant à Istanbul, Jérôme Bastion

Recep Tayyip Erdogan, le Premier ministre turc, s’envolera jeudi pour la capitale somalienne. Il passera la journée de vendredi en Somalie à Mogadiscio et aussi dans certains camps de réfugiés, avec sa femme et sa fille. Il sera accompagné de son ministre des Affaires étrangères, Ahmet Davutoglu, lui aussi en compagnie de sa famille. Le but de cette visite est d’assister à la distribution de l’aide humanitaire turque -un troisième avion, rempli de vivres et de médicaments vient de quitter Istanbul- et d’être sur place pour partager un peu le quotidien des Somaliens victimes de la sécheresse pendant ce mois de ramadan.

Il y a quelques jours déjà, un député du Parti de la justice et du développement était sur place pour coordonner l’assistance envoyée par la Turquie. Mais surtout, le gouvernement turc a appelé l’Organisation de la conférence islamique (l’OCI), qui est actuellement présidée par un Turc, Ekmeleddin Ihsanoglu, à se réunir dans l’urgence pour combattre la catastrophe qui frappe la corne de l’Afrique. Cette réunion se tiendra le mardi 16 août à Istanbul avec les ministres de l’OCI.

La population turque mise à contribution

Les Turcs sont sollicités par diverses campagnes de collectes. Et la population répond favorablement à ces appels aux dons. Pas plus tard que vendredi, un Téléthon a était organisé sur une grande chaîne de télévision pour collecter des fonds avec le soutien de personnalités du show-business ou de la politique. Plus de 11 000 personnes ont décroché leur téléphone alors que plus de 600 000 autres ont envoyé des SMS pour faire un don. Au total : quelque 13 millions d’euros ont été collectés. C’est un record pour ce pays.

Ce qui est frappant, c’est le nombre d’initiatives appelant à la solidarité. Presque tous les grands groupes de presse, leurs chaînes de télévision, ont lancé des campagnes similaires. La direction des Affaires religieuses a même installé dans les mosquées des automates destinés à récolter les aumônes pour le peuple somalien.

C’est vrai que le mois de ramadan se prête particulièrement à ce genre d’initiative : c’est le mois de la solidarité, de la compassion. On voit de multiples associations, organisations, institutions, mobilisées et partout dans les rues, des affiches appellent à la générosité des Turcs qui ne se sont sans doute jamais effectivement manifestés aussi fortement.

Pourquoi un tel soutien à la Somalie ?

Il y a quelques années, la crise du Darfour au Soudan avait déjà, et sans doute était-ce la première fois, suscité l’intérêt des Turcs et justifié l’envoi l’équipe du Croissant-Rouge turc et le déplacement de journalistes sur place. Ils avaient été choqués de découvrir les réalités de ce continent, un peu comme un électrochoc.

La Turquie parallèlement a mené ces dernières années une diplomatie très volontaire, à la fois dans le monde musulman et en Afrique. Une attitude qui a un double objectif : développer son économie en ouvrant de nouveaux marchés et renforcer son influence dans le monde, ce qui lui a permis d’obtenir un siège de membre non permanent au Conseil de sécurité des Nations unies l’an dernier. Ankara a ainsi ouvert des dizaines de nouvelles représentations diplomatiques sur le continent africain et créé autant de nouvelles liaisons aériennes avec les capitales de ces pays. Il était donc normal de tendre la main à ceux de ces pays qui sont le plus dans le besoin aujourd’hui.

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