Ennahda, force politique incontournable en Tunisie, fête ses trente ans

Le mouvement islamiste tunisien, Ennahda, célèbre ses 30 ans. Ce mouvement, longtemps interdit, a subi durant de nombreuses années la répression du pouvoir Ben Ali. Son chef fondateur Rached Ghannouchi est resté de longues années en exil à Londres. Il est récemment rentré à Tunis au moment de la légalisation de son parti. Même s'il inquiète une partie des réformistes tunisiens, le mouvement reste considéré comme un mouvement islamiste modéré, surtout au regard d'autres mouvements beaucoup plus extrémistes.

Le parti de Rached Ghannouchi entend être présent aux prochaines élections pour mettre en place une assemblée constituante. Ennahda est plus que jamais un parti politique tunisien qui compte et qui entend peser pour la construction de la Tunisie. Il prépare pour cela un véritable programme électoral comme le confirme Ajmi Lourimi, l'un des membres fondateurs du mouvement.

Pour Vincent Geisser, chercheur au CNRS (Centre national de la recherche scientifique), Ennahda apparaît comme l'une des principales forces politiques tunisiennes, grâce aux réseaux sociaux très développés à travers tout le pays.

La concurrence salafiste du Hizb Ettahrir 

Si Ennahda a obtenu en mars dernier sa légalisation, ce n'est pas le cas du mouvement Hizb Ettahrir, le «parti de la libération» en arabe. Ce mouvement d'obédience salafiste reste minoritaire en Tunisie mais occupe progressivement, selon des observateurs la place publique, dans les mosquées et dans la rue. Pour Vincent Geisser spécialiste de ces questions au CNRS  Ettahrir est dans la surenchère identitaire, bien loin des valeurs démocratiques : « C’est un mouvement ultra salafiste qui prône carrément le retour au khalifat islamique. Ce parti a refait florès au lendemain du départ de Ben Ali, publiquement, se rendant l’auteur de provocations ». Parmi lesquelles, selon le chercheur, l’islamisation totale de la société, la lutte contre les quelques prostituées qui existent en Tunisie, ou une sorte de radicalité islamique dans le discours.

Le gouvernement de transition a refusé de légaliser le parti de la libération. Selon Vincent Geisser, Ennahda doit à tout prix marquer clairement sa différence avec cette mouvance salafiste et éviter la confusion entre le politique et le religieux. Selon plusieurs observateurs, Ennahda est déjà traversé par des courants contraires, des réformistes à sa tête et des tentations plus populistes et identitaires parmi ses militants. 

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