La Tunisie toujours en attente d’un retour à la normale

Près de quatre mois après la fuite du président déchu Ben Ali, la Tunisie est toujours en convalescence démocratique. Ces derniers jours, depuis le jeudi 5 mai 2011, des soubresauts de contestation agitent notamment la capitale et sa banlieue ainsi que d’autres villes du pays. A tel point que le gouvernement a décrété, samedi 7 mai, un nouveau couvre-feu pour Tunis et sa banlieue entre 21h00 et 05h00 heure locale et cela pour une durée indéterminée.

Une partie de la population tunisienne continue de clamer haut et fort qu’elle n’a pas eu son content de changement depuis la chute du président Ben Ali, le 14 janvier 2011. Cette impatience se manifeste notamment depuis jeudi, le 5 mai, où des centaines de manifestants réclamaient la démission du gouvernement transitoire. Un des slogans scandés appelle à une « nouvelle révolution », une exigence relayée de plus en fréquemment par des Tunisiens qui ont l’impression que le pouvoir est peu ou prou le même qu’avant le 14 janvier.

Le gouvernement a beau donner des gages de sa volonté de changement, comme la promesse d’organiser le 24 juillet des élections législatives pour désigner une nouvelle assemblée constituante chargée de rédiger une nouvelle Constitution, tous ne sont pas convaincus, tant s’en faut. Et ce n’est pas la répression policière exercée contre les manifestants de ces derniers jours qui prêchera en faveur de l’équipe intérimaire du gouvernement de Beji Caïd Essebsi…

La tension a gagné à nouveau la Tunisie après que l’ancien ministre de l’Intérieur, Farhat Rajhi a déclaré, le 4 mai, que dans l’hypothèse où le parti islamiste Ennahda gagnait les élections du 24 juillet, un coup d’État militaire des fidèles du président déchu Ben Ali rétablirait l’ordre. Même si Fahrat Rajhi a été limogé, dès le 7 mai, de ses fonctions de président du Haut comité des droits de l’homme et des libertés fondamentales, et malgré la menace de poursuites judiciaires brandies par l’armée, l’effet de ses propos a été désastreux.

Des coups et des gages

Le doute sur la réalité des changements en profondeur du pouvoir tunisien est encore alimenté par les brutalités subies par des journalistes, une quinzaine, qui « couvraient » justement les manifestations anti-gouvernementales de jeudi et vendredi à Tunis. Gifles, coups de pied, coups de matraque, insultes, confiscation de matériel… le Syndicat national des journalistes tunisiens ne décolère pas et certains de ceux qui ont été l'objet de violence ne se privent pas de faire le parallèle avec les méthodes de la police de Ben Ali. Et ce malgré les plates excuses du ministère de l’Intérieur qui en profite pour affirmer son « respect pour le travail journalistique ».

Du côté des manifestants aussi, violemment dispersés par les forces de l’ordre, la rancœur est vive. « Les policiers sont comme avant, rien ne change », disent-ils en substance… Certains appellent même de leurs vœux une « nouvelle révolution » considérant que celle du « jasmin » n’avait pas accompli ce qu’ils en espéraient. Hasard du calendrier, c’était hier, samedi 7 mai, qu’était jugé Imed Trabelsi, un neveu de l’épouse de Ben Ali, Leïla Trabelsi, un des hommes les plus honnis du pays… Interpellé le 14 janvier, il a été condamné à une amende de 2 000 dinars (1 000 euros) pour consommation de stupéfiants. La condamnation d’Imed Trabelsi, symbole de cette caste d’affairistes gravitant autour du couple Ben Ali-Trabelsi, est pour le gouvernement transitoire, un gage de sa volonté de s’attaquer aux vestiges de l’ancien régime. Mais il n’est pas certain que cela suffise à satisfaire ceux qui attendent toujours une amélioration de leurs conditions de vie dans la Tunisie de l’après-révolution.

 

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