La Côte d’Ivoire continue à vivre une situation surréaliste. A Abidjan, la vie reprend son cours, les traditionnels embouteillages sont de retour, les rues grouillent de monde et les administrations semblent fonctionner. Bref, le visage de la capitale économique ivoirienne est presque normal. Hier soir, Laurent Gbagbo a livré son premier discours officiel depuis son investiture, le 4 décembre dernier. Droit dans ses bottes, le président reconnu par le Conseil constitutionnel a réaffirmé qu’il est et restera président de la République, tout en se disant prêt à accepter une forme de médiation. Il a, par ailleurs, annoncé la levée du couvre-feu, tout en assurant que ses adversaires, à commencer par le président reconnu par la communauté internationale Alassane Ouattara, peuvent librement quitter leur réduit de l’hôtel du Golfe, où ils siègent depuis deux semaines.
Pourtant, ce mercredi matin, le lourd dispositif de l’armée loyale à Laurent Gbagbo était toujours en place sur la grande route menant à l’hôtel du Golf, toujours protégé par 800 casques bleus de l’ONU. Le camp Ouattara a, en outre, rejeté en bloc les propositions de dialogue du chef de l’Etat sortant qui n’ont, estime un très proche de Guillaume Soro, pour seul but que de « gagner du temps » et de diviser la communauté internationale.
Laurent Gbagbo a en effet proposé la venue en Côte d’Ivoire d’un « comité d’évaluation sur la crise post-électorale en Côte d’Ivoire ». Ce comité serait dirigé par un représentant de l’Union Africaine et comprendrait des représentants de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest, de l’Union économique et monétaire de l’Afrique de l’Ouest, de la Ligue arabe, des Nations unies, des Etats-Unis, de l’Union européenne, de la Russie et de la Chine. Aucune de ces institutions régionales ou internationales n’avait encore réagi, en milieu de journée, à la proposition de Laurent Gbagbo.
Quoi qu'il en soit, cette annonce ne rassure pas la France. Ce mercredi matin, le porte-parole du gouvernement français, François Baroin a recommandé à « tous les Français qui le peuvent de quitter provisoirement la Côte d’Ivoire.(…) Bien que les ressortissants étrangers ne soient pas menacés jusqu’à présent, il nous paraît nécessaire de renouveler des conseils de prudence, nous réitérons donc notre conseil consistant à différer les projets de voyage vers la Côte d’Ivoire », a ajouté François Baroin.
Même type de recommandation de l’Allemagne et du Nigeria qui a évacué les familles de ses diplomates présents dans la capitale économique ivoirienne.
Ces derniers jours, Charles Blé Goudé, ministre de la Jeunesse et leaders des jeunes patriotes, à la pointe des manifestations anti-françaises depuis 2002, a martelé qu’il n’était pas question cette fois de s’en prendre aux intérêts ou aux ressortissants étrangers. Une promesse qui ne convainc manifestement pas à Paris.