Côte d'Ivoire : l'épreuve de force se durcit entre Gbagbo et Ouattara

En Côte d'Ivoire, le camp d'Alassane Ouattara a appelé ses partisans à marcher le jeudi 16 décembre sur la RTI radio-télévision d'Etat pour y placer un nouveau directeur général et à l'aider ensuite, le lendemain à prendre le contrôle du siège du gouvernement pour y installer Guillaume Soro et ses ministres. A Abidjan, Laurent Gbagbo et ses partisans qui tiennent toujours les leviers du pouvoir sur le plan intérieur, annoncent une nouvelle médiation africaine pour tenter de régler la crise institutionnelle. De son côté, l'UE, a annoncé des sanctions à l'encontre de certains proches du président sortant.

Toujours confiné à l’Hôtel du Golf d’Abidjan, le camp Ouattara s’est résolu à lancer, jeudi et vendredi, ses partisans dans la rue. Des marches y sont programmées pour installer un nouveau directeur à la télévision d'Etat et permettre au Premier ministre Guillaume Soro, choisi par Alassane Ouattara, de réinvestir son bureau d’avant les élections.

Réagissant à cet appel, le ministre de la Jeunesse et de l’Emploi de Laurent Gbagbo, Charles Blé Goudé, s’est borné à prédire, pour jeudi, une « journée tranquille», tandis que son collègue des Affaires étrangères Alcide Djédjé a dit que cette marche ne se « ferait pas ».

Venus de plusieurs villes du nord, des milliers de partisans d’Alassane Ouattara, en ont fait hier l’amère expérience. Alors qu’ils tentaient de converger vers Yamoussoukro, ils ont été stoppés par un barrage militaire à six kilomètres au nord de la ville de Tiébissou, entre Bouaké et la capitale ivoirienne, avant d’être dispersés à grands coups de gaz lacrymogène. Or Abidjan est solidement tenue par les Forces de défense et de sécurité demeurées fidèles à Laurent Gbagbo.

Les deux marches projetées jeudi et vendredi par Alassane Ouattara sont donc des manifs à haut risque. Mardi, l'armée a tiré des gaz lacrymogènes pour disperser quelque 3 000 manifestants à Tiebissou, dans le centre. Il s'agissait de partisans d'Alassane Ouattara, venus du nord du pays.

Conséquence de cette crise politique ivoirienne, selon le HCR, 3700 Ivoiriens ont quitté le pays ces deux dernières semaines par crainte d'une explosion de violence. La plupart d'entre eux se sont réfugiés au Libéria voisin. De son côté, la pression internationale sur Laurent Gbagbo ne faiblit pas, ellle augmente même.

L'UE passe à la vitesse supérieure

L'Union européenne avait prévenu qu'elle prendrait des sanctions contre ceux qui refusent de reconnaitre l'autorité d'Alassane Ouatarra, le président démocratiquement élu. Les premiers noms sont tombés le 14 décembre. Ils sont au nombre de onze proches de Laurent Gbagbo.

Parmi les personnes visées par les sanctions européennes figurent le conseiller pour la sécurité, Kadet Berlin, le secrétaire général de la présidence, Desiré Tagro et le président du Conseil constitutionnel, Yao N'Dre. A ces noms, s’ajoutent ceux de Pascal Affi N'Guessan, secrétaire général du parti de Laurent Gbagbo, le Front populaire ivoirien (FPI) et le directeur général de la RTI, radio-télévision d'Etat, Pierre Israel Amessan Brou.

Plusieurs militaires et ou responsables de la sécurité sont concernés aussi par ces sanctions. C’est le cas du chef de la garde républicaine, le général Dogbo Blé, et le capitaine Anselme Séka Yapo,garde du corps de l’épouse de Laurent Gbagbo.

Les mesures européennes devraient prendre la forme d’une interdiction de visas ou d’un gel des avoirs, l’autre levier d’action pourrait être l’aide au développement. Mais les 27 ne semblent pas vouloir utiliser cette option dans l’immédiat.

Pour l’Union, il s’agit en fait de cibler en priorité les responsables ivoiriens qui refusent de se placer sous l’autorité du président démocratiquement élu. A l’instar de la communauté internationale, les Européens considèrent Alassane Ouattara comme le vainqueur du scrutin présidentiel.

Quant à la France, qui maintient sur place quelque 900 soldats de l'opération Licorne, elle « n'a évidemment aucune intention d'intervenir militairement » pour s'interposer en cas de violences entre les partisans d'Alassane Ouattara et de Laurent Gbabgo, a déclaré ce mercredi le ministre français de la Défense Alain Juppé à la radio France Inter, soulignant que « c'est à la communauté internationale d'assumer ses responsabilités ».

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