Confusion autour de la Commission électorale en Côte d'Ivoire

En début de soirée, ce mardi 30 novembre, la presse a été finalement convoquée au siège de la Commission électorale indépendante (CEI), après en avoir été exclue en fin de matinée. La CEI devait démarrer l'annonce, initialement prévue à 10 h GMT,  des résultats du second tour de la présidentielle à l'intérieur du pays. En milieu de journée, sur place, la tension était perceptible. La télévision ivoirienne qui devait diffuser ces résultats avait démonté son matériel. 

Gros cafouillage ce matin au siège central de la CEI. Vers 9H00 TU, les équipes de la télévision nationale présentes sur place ont reçu consigne de plier bagages. Ce qu’elles ont fait aussitôt. Et à 9H45, tout était terminé. La RTI, la Radio télévision ivoirienne, avait vidé les lieux. Evidemment, les journalistes accourus de partout pour s’informer sur ce qui se passait étaient nombreux dans la cour de la CEI. Peu après 11H00, les forces de l’ordre les en ont fait partir. Rappelons que c’est du plateau de la RTI installé à la CEI qu’étaient, jusqu’à présent, livrés les résultats provisoires de l’élection présidentielle. La RTI a fait savoir qu'elle diffuserait, le moment venu, des cassettes donnant les chiffres compilés, sans plus de précisions. 

On s’interroge bien entendu sur les raisons de cet éloignement de la presse du siège central de la CEI. Et il y a de quoi. Ainsi, pourquoi les confrères d’Onuci FM (la radio des Nations unies), qui ont aussi un studio sur place, ont-ils été également priés de lever le camp ? Deux journalistes de RFI ont pu néanmoins demeurer discrètement dans les locaux. L'un d'entre eux a pu ainsi constater que les commissaires centraux continuaient de consolider les résultats du second tour dans la grande salle du premier étage. A un moment, l'un de nos journalistes dit même avoir entendu des éclats de voix qui sourdaient à travers les portes de la salle. Mais il est vrai qu’au premier tour, affirme-t-il, il avait également entendu des éclats de voix entre les commissaires centraux dans les mêmes conditions.

Vers 11H45, le patron de l’Onuci Yung Jin Choi est arrivé sur place pour rencontrer le président de la commission Youssouf Bakayoko. Le représentant de l'ONU dans le pays s'est rendu ce mardi matin au siège de la CEI.

Pour son porte-parole, Hamadoum Touré, la Commission électorale travaille toujours. « Ce matin, les fonctionnaires de l’ONUCI en ont profité pour rendre visite aux commissaires, qui sont en plein travail, pour les encourager et leur dire notre disponibilité à poursuivre notre appui. »

Le verdict des observateurs de l'Union européenne

Dans ce contexte, une délégation des observateurs de l'Union européenne a convié la presse, ce mardi matin, pour revenir sur la tenue du scrutin de dimanche. Les observateurs de l'UE  ne cachent pas que le second tour s’est déroulé sous tension. Il y a eu des morts dans l’ouest, des blessés, des obstructions de vote. Mais d’après eux, dans 96% des bureaux de vote observés (943 sur 20.073), le vote de dimanche s’est déroulé de manière très bonne, bonne ou acceptable.

En clair, d'après eux, le jour du scrutin, les Ivoiriens ont pu exprimer leur choix. En revanche, la mission d’observation de l’Union européenne ne tire pas de conclusion définitive sur l’ensemble du processus électoral, car celui-ci n’est pas achevé.

Pour elle, c’est à la Commission électorale indépendante puis au Conseil constitutionnel de proclamer les résultats provisoires puis définitifs de cette élection. La mission de l’Union européenne encourage par ailleurs la CEI a annoncer le plus rapidement possible les résultats partiels. Enfin, signe de la tension actuelle, la mission d’observation a décidé de retirer la plus grande partie de ses observateurs du territoire ivoirien.

Dans ce contexte, la coalition de l'opposition a donné ce mardi après-midi une conférence de presse. Pour Toikeusse Mabri, l'un de ses porte-parole, il y a eu une tentative d'obstruction de la part des membres de La majorité présidentielle (LMP), mais tout serait rentré dans l'ordre. Il a ajouté que, selon lui, Laurent Gbagbo est dans une « logique de confiscation du pouvoir »« Quant à nous, on ne se proclame pas vainqueurs mais on est confiant », a-t-il expliqué, tout en précisant:  « si la CEI reste indépendante,  la victoire ne nous échappera pas». Le camp présidentiel a, de son côté, présenté à la presse des militants pro-Gbagbo qui ont témoigné comme avoir été victimes d'intimidations et de violences dans le nord, le jour du vote. 

Lundi, le camp Gbagbo avait annoncé avoir saisi la CEI « pour faire en sorte que (les) résultats soient invalidés » dans au moins trois régions du nord, tenues par l'ex-rébellion des Forces nouvelles (FN) depuis le putsch avorté du 19 septembre 2002. Dans cette zone, où Alassane Ouattara avait dominé le premier tour, les élections « n'ont pas respecté les normes d'un scrutin transparent », avait affirmé le porte-parole du candidat Gbagbo, Pascal Affi N'Guessan, dénonçant des « bourrages d'urnes ». « Au regard des chiffres en notre possession » , M. Gbagbo « ne peut perdre cette élection »,  a-t-il assuré. Le camp Ouattara, de son côté, affirme que les partisans de Laurent Gbagbo ont empêché ses électeurs de voter notamment dans le centre-ouest, en zone loyaliste.

 

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