Suspension du procès de Thomas Lubanga

Les juges de la Cour pénale internationale (CPI) ont ordonné, le 8 juillet, la suspension du procès de Thomas Lubanga après le refus du procureur de se conformer à leurs ordonnances. Accusé de crimes contre l’humanité et crimes de guerre, l’ancien chef de milice de la République démocratique du Congo (RDC), Thomas Lubanga, est incarcéré depuis quatre ans à La Haye.

De notre correspondante à La Haye,

Le procureur de la Cour pénale internationale (CPI) pourrait payer durement son refus d’appliquer les ordonnances des juges. Le 8 juillet, en fin d’après-midi, les magistrats en charge de l’affaire Lubanga ont ordonné la suspension du procès, estimant que « le procès équitable de l’accusé n’est plus possible » et que « la justice ne peut pas être rendue ».

Accusé par le procureur de crimes contre l’humanité et crimes de guerre pour avoir enrôlé des enfants au sein de sa milice, l’Union des patriotes congolais (UPC), Thomas Lubanga a tenté de démontrer, au cours des six derniers mois, que certains des témoins présentés par le procureur au cours de l’année 2009 ont menti. Les auditions, dont la majorité s’est tenue à huis clos, laissent apparaître que les témoins auraient été corrompus, notamment par les « intermédiaires » du procureur.

Des témoins auraient été corrompus

Chargés d’assister le procureur dans ses enquêtes, les « intermédiaires » auraient demandé à des témoins de présenter de faux témoignages, en échange d’une rémunération. Au cours des derniers jours, les juges ont demandé au procureur de délivrer à la défense le nom de l’un de ces intermédiaires. Deux d’entre eux ont déjà été auditionnés par la Cour, ces derniers jours. Usant de manœuvres dilatoires, le procureur a tenté de reporter l’échéance pour finalement s’y opposer, agitant l’argument de la sécurité. Pour le procureur, « il est susceptible d’être tué parce qu’il est considéré comme un traître, probablement par Thomas Lubanga ». Or comme il apparaît dans la décision rendue ce jeudi 8 juillet, l’intermédiaire bénéficie en réalité de toutes les mesures de protection prévues par la Cour.

L’affaire Lubanga révèle les faiblesses du procureur

Le procureur a encore la possibilité de faire appel de cette décision. En attendant, les juges sont prêts à étudier toute requête demandant d’éventuelles mesures disciplinaires et ont ordonné une nouvelle audience au 15 juillet pour débattre des conditions de détention de l’accusé, incarcéré à La Haye depuis mars 2006.

C’est la seconde fois que le procès de Thomas Lubanga est suspendu en raison des défauts enregistrés dans l’enquête du procureur. En réalité, les deux procès entendus devant la Cour, contre trois chefs de milices congolaises de l’Ituri, Thomas Lubanga, Germain Katanga et Mathieu Ngundjolo, révèlent crument les faiblesses des dossiers défendus par le procureur et de ses techniques d’enquête.

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