Des marionnettes françaises pour incarner la nation arc-en-ciel sud-africaine

Vous les avez peut-être aperçues lors de la cérémonie d’ouverture du Mondial : les marionnettes géantes. Figurez-vous qu’elles viennent de loin… d’Aubervilliers en France. L’association « Les grandes personnes », basée en région parisienne, a travaillé durant des semaines avec des plasticiens, des costumiers et des volontaires des townships sud-africains pour mettre au monde trente marionnettes géantes. Elles incarnent la diversité de la nation arc-en-ciel et sont en tournée à travers l’Afrique du Sud.

Avec notre correspondant à Johannesburg, Nicolas Champeaux

Les manipulateurs des marionnettes étaient en nage à la mi-parcours. Heureusement les organisateurs avaient prévu des remplaçants pour le défilé de Soweto, explique Eric Dessaria, un artiste français associé au collectif « Les grandes personnes » : « Pour les marionnettes qui font trois mètres cinquante de hauteur, c’est assez fatigant, car elles pèsent environ quinze kilos. Elles sont portées sur le dos avec un harnais donc d’habitude c’est supportable, mais le parcours de Soweto est long, il fait deux kilomètres, c’est tout de même une trotte ».

Les marionnettes sont de hautes sculptures d’argile recouvertes de papier mâché. Elles incarnent des personnages types de la nation arc-en-ciel : il y a le révérend John, un prêtre blanc qui boit de la bière, un gardien de parking au gilet phosphorescent, un DJ d’origine indienne, Laetitia qui est métisse, et bien d’autres. Cette joyeuse bande a défilé de bon matin dans les rues de Soweto pour le bonheur des habitants du township.

« J’ai été réveillé par la fanfare donc j’ai voulu voir et je dois dire que c’est une très bonne idée », applaudit Lucky, qui était en pyjama sur son palier. Les marionnettes ont rempli leur objectif, se félicite Laurent Clavel directeur de l’Institut français d’Afrique du Sud :

« En Afrique du Sud, on le sait, l’espace public n’est pas encore vécu comme quelque chose d’amical, on ne s’y sent pas forcément bien, en tous les cas on n’y vit pas. Et pour nous l’une des réponses évidentes consiste à amener l’art dans l’espace public. Parce que des centaines de personnes vont voir ces marionnettes, elles vont partager au même moment la même joie, la même émotion, donc cela crée un espace de vie et de joie dans l’espace public, et ça, ça reste dans les mémoires».

La pièce jouée par les marionnettes raconte l’histoire d’une adolescente issue d’une famille aisée. Elle s’est éprise d’un jeune homme pauvre qui appartient à un groupe ethnique différent du sien. Les deux familles s’opposent à cette union et s’apprêtent même à en venir aux mains. C’est là que la jeunesse intervient, explique Ntlantla Denemkwanasi, qui a participé à l’atelier d’écriture : « Les jeunes, plaident que l’amour n’a pas de couleur, et invitent les deux camps à se retrouver pour une partie de football ».

Les ethnies différentes finiront évidemment par former une belle équipe. Cela dit le rapprochement avec le Mondial s’arrête là, estime Christophe Evette de l’association « Les grandes personnes » : « Ce n’est pas une compétition et j’espère qu’il n’y aura pas de perdant ! Des gens de niveaux très différents ont participé à ce projet ; des gens issus des différents townships de Johannesburg, mais aussi des jeunes de l’université et de l’école d’art, donc je crois que les marionnettes reflètent la diversité de leurs créateurs ».

Les marionnettes géantes défileront à Soccer City juste avant la finale du Mondial puis elles s’envoleront pour le Rwanda.

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