A 27 ans, Trésor Mputu Mabi est LA star de l’équipe nationale de la République démocratique du Congo, loin devant Dieumerci Mbokani ou Trésor Lualua. Avec sa belle petite gueule et son sourire charmeur, on lui donnerait presque le Bon Dieu sans confession.
Pourtant, le pensionnaire du Tout Puissant Mazembe est tout sauf un enfant de chœur. La liste des coups de sang de l’attaquant de la RDC n’est pas aussi longue que celle de ses exploits. Mais elle est tout de même bien fournie avec, notamment, une suspension d’un an décrétée par la Fifa en août 2010, pour avoir tenté de piétiner un arbitre.
« Ça l’a marqué, ça l’a abîmé, confie Claude Le Roy, le sélectionneur de la RDC et père spirituel de Mputu. Ça lui a fait perdre un an, ce qui est énorme dans une carrière de footballeur. […] On n’attaque pas un arbitre, c’est interdit. Mais il l’a payé très très cher. Et depuis, il a démontré beaucoup de courage pour revenir au plus haut niveau. »
« Un joueur quasiment ingérable »
Après douze mois d’absence, Trésor Mputu marque en effet dès son retour, après quelques secondes de jeu seulement. Preuve que l’incroyable talent du garçon ne s’est pas envolé. En revanche, l’image, elle, est écornée. « A mon retour, je n'ai pas voulu le condamner même si certains m’avaient demandé de le faire, explique Claude Le Roy. On m’avait demandé de ne plus jamais le prendre en équipe nationale, comme Dieumerci Mbokani. Mais dès mon premier match à la tête de la sélection, je l’ai pris et j’en ai fait mon capitaine »...
Un choix qu’assume l’entraîneur français : « J’en ai fait mon capitaine parce que c’est quelqu’un de quasiment ingérable, compliqué. […] Je lui ai donné des responsabilités et il les a assumées. Il n’est pas un leader mental, même s’il démontre sa personnalité vis-à-vis du groupe chaque fois que c’est nécessaire. »
Souverain en Afrique
En Afrique du Sud, Trésor Mputu dispute sa deuxième CAN. Il était déjà de l’aventure en Egypte, avec Trésor Lualua et Matumona Zola. Cette CAN 2006 avait été un parfait résumé du personnage. A 20 ans à peine, le natif de Kinshasa avait ouvert le score face au Togo d’un ballon piqué inspiré, avant de se faire expulser face à l’Angola après avoir asséné un coup de pied dans les bourses d’un joueur adverse…
Depuis, l’Afrique a appris à prononcer son nom. Avec Tout Puissant Mazembe, Trésor Mputu a tout gagné, notamment deux Ligues des champions où il détient le record de buts inscrits. Avec la RDC, le n°8 a également remporté le Championnat d’Afrique des nations 2009 (la CAN des joueurs locaux) dont il a été élu meilleur joueur.
En 2006, Claude Le Roy dressait même un parallèle avec le Camerounais Samuel Eto’o : « Je les ai dirigés quasiment au même âge. ‘Sam’ était un tout petit peu plus jeune. Il avait 17 ans quand je l’ai emmené à la Coupe du monde 1998. La première fois que j’ai vu ce Trésor tout timide, j’ai été ébloui par son talent techniquement. Il doit être le seul joueur à avoir réussi un triplé durant chaque période d’une finale du championnat du Congo. […] C’était incroyable. A ce moment-là, je pense qu’il était inarrêtable. »
Pas d’avenir en Europe ?
Une décennie après son arrivée à Lubumbashi, Trésor Mputu évolue toujours chez les Corbeaux. Sa réputation est pourtant parvenue jusqu'en Europe. En novembre 2007, Arsène Wenger, l’entraîneur français d’Arsenal, tente ainsi d’attirer Mputu en Angleterre. Mais l’affaire capote sans qu’on sache clairement qui du joueur ou du club a freiné des quatre fers…
Depuis, le protégé du millionnaire Moïse Katumbi – propriétaire du Tout Puissant – n’a jamais démontré une envie pressante de quitter la province du Katanga. Un choix judicieux selon Claude Le Roy : « Il a fait le choix intelligent de rester à Mazembe, dans un grand club bien structuré. Un footballeur africain, lorsqu’il a le choix, a bien raison de rester et d’être dix fois plus heureux chez lui, plutôt qu’aller se morfondre dans des hivers européens. »
Reste qu’en RDC, Trésor Mputu n’a plus beaucoup de défis à relever, ce qui ne l’aide pas à se remettre en cause. « Il a envie de rester au haut niveau, de franchir des paliers lors de grandes compétitions, décrypte Le Roy. Mais l’envie de progresser, il faut l’avoir tous les jours à l’entraînement. Il a encore du mal à se faire mal dans ce domaine-là. Mais dès qu’il sent l’odeur du souffre, de la compétition, on le retrouve. »
Déterminant face au Mali
Les Léopards ont besoin d’une victoire face au Mali pour se qualifier en quarts de finale de la CAN 2013, ce 28 janvier à Durban. Si un léger pépin à la base du quadriceps ne le gêne pas trop, Trésor Mputu sera encore un des principaux atouts de la RDC. « Il a une pureté technique incroyable, une vitesse gestuelle, analyse Claude Le Roy. Il sent les coups, il met le ballon là où personne ne l’attend. Bref, il a la qualité de tous les grands joueurs : il surprend ». Souvent dans le bon sens. Parfois dans le mauvais. Mais Mputu a les clés en mains pour prendre la bonne direction.
De notre envoyé spécial à Durban,